Le monde a soif d'amour

Le monde a soif d’amour,  tu viendras l’apaiser.
Arthur Rimbaud

Chapitre 1

Concert manqué

C’est avec une certaine excitation que je me préparai à aller au concert avec ma petite amie, quand la sonnerie du téléphone grésilla. C’était elle ! Sa voix s’étrangla pour dire qu’elle ne viendrait pas.

Je tenais mon billet de concert à la main sans aucune réaction. Ma fiancée décida de me plaquer à la dernière minute. 

Que lui était-il passé par la tête ? Avait-elle eu une aventure avec un autre ? Même pas. Elle ne voulait plus me voir, tout simplement parce que ça devenait trop sérieux et qu’elle commençait à paniquer.

Quelle excuse pour me quitter ! Je n’en revenais pas. Je restais pantois, l’air hagard. Je regardais le billet du concert en me demandant ce que j’allais bien pouvoir en faire ? Aller au concert seul ? L’envie n’y était plus.

Quelle idiote ! Me laisser tomber juste aujourd’hui ! Elle ne pouvait pas attendre quelques jours de plus ? Non. C’est justement aujourd’hui qu’elle décide de clôturer notre relation, alors que je me faisais une joie d’aller avec elle à ce concert.

Je m’affalai sur le fauteuil. Vidé. Je pris une cigarette, puis une seconde, puis une troisième. La pièce commençait à sentir le tabac. Bon, il faut que j’arrête. Ça ne produit rien de fumer.

Je vais regarder le concert à la télé. Ce sera déjà ça. Et dire que j’étais allé chez le coiffeur, chez la manucure, acheter des vêtements pour plaire à ma copine. Et voilà, le résultat ! Je suis seul comme un chien ce soir. Tant d’efforts pour rien. Mon cœur était broyé. J’étais anéanti.

J’ouvris une boîte de thon et la vidai dans une baguette. Je décapsulai un coca. Bon, ce n’est pas la fin du monde si ma copine n’est plus amoureuse de moi. Il y en aura d’autres. Ne dit-on pas «  une de perdue, dix de retrouvées » ? Vouais ! Mais une autre, ce ne sera jamais elle !

Allez, regarde le concert à la télé, comme ça tu n’auras pas tout raté.

Je regardais l’écran télé sans voir ni entendre. J’ai dû sans doute m’endormir. Car, quand j’ouvris les yeux, je vis sur l’écran télé des voitures de police rangées en rang d’oignons devant la salle de concert avec le hurlement des sirènes.

Que s’était-il passé ?

Ce vendredi 13, je pensais que c’était mon jour de chance. Et voilà que ma copine me plaque juste avant le concert pour je ne sais quel motif, alors que nous avions eu du mal à obtenir des places tant la demande était importante. Notre groupe préféré allait se produire à Paris ! Hugo avait remis à Manon sa place de concert afin qu’elle entre dans la salle s’il terminait son travail avec du retard. Il la rejoindrait dès que possible.

Je ne sais ce que s’est passé dans ma tête, mais ce soir-là je décidai de partir. N’importe où. Loin, très loin. Elle a voulu s’éloigner de moi, alors qu’elle m’oublie ! Je cherchai sur internet des billets pour un weekend. Pourquoi pas Venise ? Au moins, j’allais me changer les idées pour quelques jours.

Puis de fil en aiguille, je décidai de ne plus revenir chez moi. Trouver un travail ailleurs, voir d’autres gens, d’autres contrées. L’effacer. Tout effacer. Que va dire mon patron de stage s’il ne me voit pas à mon poste lundi ? Et puis je m’en fiche. Qu’il pense ce qu’il veut. Moi d’abord !

Je pris mon billet sur Internet et payai avec ma carte bleue. Je téléphonai à ma mère en lui disant que je partais pour quelques jours chez un ami. Quelques jours seulement pour commencer. Ensuite je verrai. Il ne faut pas qu’elle s’inquiète pour moi. Je n’allais tout de même pas lui infliger des soucis par mon absence. Elle, qui a toujours été là quand j’en avais besoin.

Je préparai à la hâte mon baluchon et réservai une chambre dans un hôtel pour le premier jour. Ensuite, sur place j’improviserai. Une chambre dans un Airbnb, ou chez l’habitant. Je prendrai ce qu’il y a de moins cher.

Je jetai un dernier coup d’œil sur mon portable. Un espoir vite déçu. Pas de message. Je pris mes clés, mon baluchon, et fermai la porte de mon appartement. Un bla-bla car, vint me chercher comme prévu. Mon voisin dans la voiture ne cessait de parler en anglais avec le chauffeur. Un casse-tête pour suivre la conversation quand on baragouine dans cette langue.

 Arrivé à l’aéroport, je fis quelques emplettes et passai le contrôle des bagages.

Lors du contrôle, mon baluchon fut mis de côté. Pourquoi ? Pour voir s’il n’y avait pas de trace de poudre, me dit l’employé en plaisantant. Puis, je pris l’escalier roulant pour le second étage. Je mis mon baluchon sur la marche devant moi, et me retournai une seconde à peine. Mon bagage dévala sur moi et un homme juste derrière, me prit fermement par le bras pour stopper ma chute.

Enfin, j’arrivai sur le tarmac. Monté dans l’avion, je n’avais pas vu quelle place m’avait été attribuée. Avec un peu de chance, je serais relégué près des toilettes. Place que je détestais.

Eh ben vouais, c’est au dernier rang qu’on me plaça, juste près des toilettes. Bref, une journée de merde ! Mais en compensation, à côté de moi, une jolie jeune fille me fit la conversation alors que j’avais la tête ailleurs. Je me demandais si je n’avais pas fait une bêtise de m’éloigner de cette façon. En faisant cela, je donnais raison à mon idiote de copine. Pourquoi idiote ? Elle a le droit de me laisser tomber, non ?

Juste avant le décollage, je regardai les actualités sur le journal « Le Monde » que je recevais tous les jours sur mon iPhone. J’appris de cette façon les détails sur un attentat qui avait eu lieu à la salle de concert où je devais me rendre avec Manon. Je fus pris de panique. Et si ma copine y était allée ? Un carnage où tant de personnes avaient perdu la vie ou étaient blessées. Manon, se trouvait-elle parmi eux ?

J’apprendrai encore par le journal, des détails. Que la salle de concert où nous devions nous rendre avait été prise d’assaut par des terroristes, et que les morts et les blessés se comptaient par dizaines avant que la police n’intervienne. Des personnes avaient été prises en otages par des terroristes. Les policiers avaient bien essayé de stopper le carnage, mais ce fut un échec total. L’endroit avait été bouclé par la police. Des personnes en terrasses de cafés, avaient elles aussi été visées. Un bras de fer s’était engagé entre la police et les attaquants.

Et si Manon se trouvait sur la liste des victimes ? Cette question tournait en boucle dans ma tête.

Je ne savais pas quoi faire. M’enquérir de ses nouvelles ? Lui serait-il arrivé quelque chose ? Je me rendais compte que mon cœur battait encore pour elle. Je croyais qu’en quittant Paris, j’allais d’un coup de baguette magique l’effacer à jamais, alors qu’au contraire son souvenir devenait incandescent. Son amour m’avait métamorphosé et il ne lui reste d’un seul coup, que des débris de son engouement pour moi.

Affolé, je cherchai à nouveau, fébrilement sur mon iPhone, si le nom de ma copine ne figurait pas parmi la liste des victimes. Je ne la trouvai pas. La liste des victimes s’allongeait d’heure en heure. Mon cœur saignait. Je vais la contacter dès que j’arriverai à Venise.

Mais, ne dois-je pas l’oublier puisque c’est ce qu’elle veut ?

De toute façon je reviendrai dans quelques jours. Je ne peux chambouler ma vie sur un coup de tête. Pendant ce séjour, je vais m’amuser, faire l’impasse sur cette rupture. Juste quelques jours et je reviens. J’avais envie de dire à Manon, « Attends-moi ». Je regardais machinalement mon iPhone. Toujours pas de message. L’envie de l’appeler me tenaillait, mais je craignais de me faire claquer la porte au nez.

Juste quelques jours et je reprendrais contact avec elle. Le temps de me refaire une santé morale. Surtout, ne pas ramper devant elle. Mon ego en prendrait un sacré coup. Je me sentais subitement très fatigué, comme si j’avais à porter des tonnes.

Je me tournai vers le passager assis à mes côtés qui lisait son journal. Il avait l’air si serein ! Il n’y avait pas de gros titres sur l’attentat. Le journal ne devait pas être récent. De l’autre côté de l’allée, une vieille dame très maquillée sans doute pour cacher son âge qui au contraire la vieillissait, essaya plusieurs fois de me faire la conversation. Je fermais un instant les yeux. Je voyais Manon en face de moi à la bibliothèque de la Faculté avec son sourire enjôleur et ses yeux pleins de malice.

Je dois chasser son souvenir.

Chapitre 2

Code d’accès     

En arrivant à l’hôtel, je déposai mon bagage. La chambre meublée avec un faste italien m’accueillait. Je déballai mon baluchon sur le lit et sortis mon jogging pour faire plus décontracté. Je vais marcher un peu, ça me détendra.

Juste avant de sortir de ma chambre, je trouvai sur le meuble bureau un magazine dans lequel on parlait d’une soirée pour célibataires dans la ville. Il fallait juste s’inscrire par Internet et payer cent euros. Buffet et champagne à volonté. Au fond qu’est-ce que je risque d’y aller ? Ça me changera les idées. Bien fait pour Manon ! Je ne vais tout de même pas m’enliser dans la déprime à cause d’elle. Allez vieux, bouge-toi !

Je m’inscrivis le soir même, et allai à cette soirée idyllique après avoir pris soin de me faire beau comme un véritable dandy parisien. Je notai le numéro du code d’accès de la villa et partis en me disant que j’allais remplacer Manon. Au moins pour un soir. Je ne vais surtout pas me gêner !

Je pris un taxi Uber qui me déposa près de la villa. J’étais un peu en avance. Je sortis le numéro d’accès de ma poche et le composai. La porte s’ouvrit. J’avançai hésitant dans un patio verdoyant qui donnait sur une sorte de loft où il y avait une musique douce. 

Le cadre était enchanteur. Une décoration digne des mille et une nuit ! Le bar était à disposition et des bouteilles d’alcool à profusion sur un comptoir. Je pris un whisky en attendant que les autres célibataires arrivent. Allez, te gêne pas, encore un whisky mon vieux. Il faut bien amortir les cent euros ! C’est sûr, j’allais m’amuser. Je ne raterais pas la femme séductrice. Je passais devant une bibliothèque remplie de livres en plusieurs langues. Il fallait tuer le temps jusqu’à l’arrivée des autres célibataires. Un bref regard sur ma  montre m’indiqua que cela faisait presqu’une heure que j’étais là. Des retardataires ? Pas d’impatience, ils vont finir par arriver.

Je cherchai des glaçons à mettre dans mon whisky. Oui, ce serait meilleur avec des glaçons. J’avançai pour trouver la maîtresse de maison, traversai l’immense pièce, et je découvris un grand lit qui se trouvait juste derrière les banquettes du salon sur lequel était allongée une jeune femme dénudée, les cheveux longs châtains clairs, épars sur l’oreiller, les yeux clos. Je m’approchai, et à ma grande surprise je vis qu’elle était attachée par une corde au bras du lit. Ça promet ! Une orgie en perspective ? On va bien s’amuser.

J’avançai encore un peu, et fis une découverte inattendue. La jeune fille nue qui était allongée sur le lit était d’une blancheur cadavérique. Elle avait le poignet écorché qui avait laissé échapper des gouttes de sang. Une corde retenait son poignet à la tringle du lit. Je mis ma tête sur le côté cœur de la jeune fille, et je dus me rendre à l’évidence, le cœur…ne battait plus !

Pris de panique, je m’emparai de mon téléphone et appelai la police pour avoir du secours. Puis, je me demandais si j’avais bien fait de la contacter au lieu de prendre la fuite. Mais je n’arrivais plus à réfléchir avec lucidité. Tout ce qui m’arrivait ces dernières heures était difficile à supporter. Tout allait trop vite. 

Quand la police arriva,  accompagné d’un médecin, ils placèrent tout un arsenal de bandes « scènes de crime » afin de délimiter le champ. Aucun vêtement, aucun papier, et pas de téléphone portable de la jeune femme. La police examina le corps de l’inconnue, prit des photos qui devaient  servir aux enquêteurs. L’un d’entre eux, avec une petite pince prit un cheveu brun qui se trouvait sur la poitrine de la fille qu’il mit dans un sachet plastique.

Un agent de la police, lui demanda de le suivre au commissariat pour y être interrogé. Il était décontenancé.

Que diable ai-je fait pour me mettre dans une merde pareille ?

Sacrée soirée !  Ma copine qui me quitte, une soirée cauchemardesque, une garde à vue en perspective où l’on prendra mes empreintes digitales. On me demandera bien entendu la raison de ma présence dans cette villa… Et quoi encore ?

Hugo fut invité à monter dans la voiture de la gendarmerie. Ils allaient le conduire au commissariat. Dans la voiture, les gendarmes étaient silencieux. Hugo regarda par la vitre, Venise dans toute sa splendeur.

Je sens que je vais passer un super weekend à Venise.

Après avoir sinué les petites routes, ils arrivèrent enfin au commissariat San Marco. Ils descendirent de voiture et se dirigèrent vers la porte cochère du commissariat où une équipe les attendait. Le bureau était agencé en compartiments cloisonnés. 

Le commissaire Kerval accrocha son pardessus sur le porte-manteau, et désigna une chaise près de son bureau.

— Bonjour. Je suis le commissaire André Kerval.

— Hugo De La Martinière.

— Je vais prendre vos coordonnées. Vos papiers, s’il vous plaît.

Hugo s’exécuta.

— Voici, dit-il en sortant sa pièce d’identité de son portefeuille.

— Dans quelles circonstances, vous êtes-vous trouvé dans cette villa, précisément le jour du crime ?

— En fait, j’ai quitté Paris parce que ma copine m’a largué, et j’étais venu faire un break en Italie pour quelques jours.

— Un break ?

— Oui, un break. Ou une pause, comme vous voulez.

— Ça n’explique pas comment vous vous êtes trouvé dans la villa.

— En arrivant dans ma chambre d’hôtel à Venise, un magazine parlait d’une soirée de célibataires dans une villa pour cent euros que j’ai réglés avec ma carte bleue.

— Quel magazine ?

— Je ne m’en souviens plus. Mais je peux le récupérer en rentrant.

— Oui. Essayez de nous le transmettre pour vérifier vos dires.

— D’accord.

— Continuez.

— Une fois que j’ai payé les cent euros avec ma carte bleue, ils m’ont donné le code d’accès où devait se dérouler la soirée de célibataires. En arrivant à la villa, j’ai composé le code et la porte s’est ouverte.

— Quel code ?

Hugo sortit de sa poche le papier sur lequel il avait griffonné le code d’accès de la villa.

— Tenez.

— Bon. Ensuite ?

— J’ai traversé le patio et je suis arrivée là… devant ce lit où il y avait cette femme nue. J’ai de suite pensé à une soirée libertine.

— Pourquoi libertine ?

— Parce que de loin, je n’ai vu que la nudité de la femme.

— Admettons. Continuez.

— C’est alors que je me suis approché et que j’ai constaté la blancheur cadavérique de la jeune femme. J’ai voulu écouter son cœur pour voir si elle était vivante, et je n’ai pas entendu battre le cœur de la jeune fille.

— Vous vous fichez de nous en plus, n’est-ce pas ?

— Mais pas du tout. Je n’oserais  pas. Je vous dis la stricte vérité.

— Ça paraît invraisemblable. Vous arrivez, vous entrez, et vous vous trouvez en présence d’une femme nue. Le rêve quoi !

— Mais je vous assure que c’est la vérité.

— Ok. On va vérifier tout ça. Pourriez-vous nous donner le nom de votre copine à Paris ?

— Mon Dieu, vous n’allez tout de même pas la mettre dans cette affaire ?

— C’est juste pour confirmer ce que vous venez de nous dire.

— Voilà son numéro de téléphone, dit Hugo en montrant son portable. Elle ne sait même pas que je suis en Italie.

— Bon. On vérifie tout ça. Vous restez à l’hôtel combien de jours ?

— Trois jours.

— Vous allez rester un peu plus, le temps qu’on entame l’enquête. Je vous dirais combien de temps vous devez rester sur Venise, ou bien si vous pouvez rentrer à Paris.

— Que vais-je dire à mon patron ?

— Donnez-nous ses coordonnées, on va le contacter.

— Je suis dans un sacré bourbier. Jamais plus je ne partirai seul quelque part. Un témoin est toujours nécessaire.

— On voit que vous tirez des conclusions un peu à la hâte. Attendez le début de l’enquête. Pour l’instant, vous pouvez rentrer chez vous à l’hôtel.

Surpris Hugo ramassa son téléphone et se dirigea vers la sortie sans demander son reste.

— Si vous voulez, un de mes hommes peut vous reconduire à votre hôtel.

— Trop aimable. Je vais appeler un Uber.

— Je tiens à vous prévenir, que si vous partez sans notre accord, je vous arrête, compris ?

— Rassurez-vous. Je ne partirais pas sans votre accord.

— On peut vous joindre à l’hôtel ?

— Oui. Vous pouvez m’y joindre.

— Bien. Un instant Hugo.

Hugo fit volte-face.

— Oui commissaire ?

— Non rien. Vous pouvez partir.

Kerval se retenait de lui dire que sa petite amie l’avait peut-être sauvé d’un carnage en ne venant pas pour le concert.

Hugo devait prévenir le cabinet dentaire dans lequel il faisait un stage de fin d’études. Mais bon, cela était secondaire. Il se demandait combien de temps il devrait rester en Italie. Le break devenait stressant.

Et dire que j’ai payé mon voyage, les taxis, l’hôtel et les cent euros pour cette soirée. Ça revient cher pour une putain de soirée !    

Le policier regarda son co-équipier.

— Lui aurait-on tendu un piège ? Dans son affolement, il a perdu toute notion.

— Il n’a même pas demandé à quand remontait l’heure du décès.

— Il n’a tout simplement pas analysé les faits. Ni la scène de crime.

— Selon moi, il ne s’agit pas d’un suicide. La fille n’a pas pu entailler son poignet elle-même. La personne qui a fait ça est un amateur et a pensé que la thèse du suicide serait retenue. Quelqu’un l’a assassinée, et ensuite l’a attachée pour faire croire à une soirée libertine.

— Vous devez avoir raison. Il n’y a pas de sang sur la corde. Ou si peu. L’entaille au poignet même minime a été faite bien avant, me semble-t-il.

— Et ce n’est que bien après qu’elle aurait été attachée ?

— Sans doute.

— Il faut donc écarter la thèse du suicide. Le médecin légiste le confirmera.

— Si je comprends bien,  l’assassin l’aurait attachée après son décès.

— Il faudrait voir si elle n’a pas été droguée au préalable et si l’assassinat a eu lieu dans la villa, ou bien si elle y a été transportée.

— Bref, cette histoire sent mauvais.

— Vous en pensez quoi ? Vous y croyez, vous, à une soirée libertine ?

— Je ne sais pas. L’enquête nous le dira.

— Cet Hugo n’est pas d’ici. La femme non plus n’est pas d’ici sans doute. Elle a l’air d’être une femme de l’Est. Une Russe ou quelque chose comme ça.

— Ça va nous demander pas mal d’efforts pour reconstituer le puzzle.

— L’heure du décès qui sera confirmée par le médecin légiste, pourra peut-être exonérer Hugo de tout soupçon. Il faudrait voir si à cette heure-là,  il se trouvait déjà en Italie.

— Oui, c’est vrai. Il est nécessaire de récupérer son billet d’avion, et éventuellement le ticket du taxi.

— On a déjà eu des enquêtes difficiles qu’on a résolues…mais celle-ci me semble particulièrement compliquée. Pas de vêtements, pas de portable et pas d’indices.

— Espérons que nous aboutirons.

— Oui, mais là, on n’a rien. Il n’y a même pas un tatouage ou piercing sur la victime, ce qui aurait permis de l’identifier. Remonter l’affaire va être difficile.  

— C’est vrai. Pour l’instant, on n’a qu’une seule et unique personne à notre disposition, cet Hugo.

— Que fait Hugo dans la vie ?

— Il nous a dit qu’il terminait ses études de chirurgie dentaire.

— Ce n’est donc pas un voyou. Mais il faut quand même vérifier s’il n’est pas dans nos archives.

— On va se renseigner tout d’abord sur les propriétaires de cette villa. Et retracer les fréquentations de ces soirées.

— Tu as raison.

— Il faudrait remettre la photo de la jeune fille à la centrale, pour voir si quelqu’un la connaît.

— On va d’abord vérifier auprès de la banque d’Hugo le destinataire des cent euros réglés par carte bleue sur internet pour cette soirée. On pourra ainsi remonter la filière.

— Il faudrait aussi interroger les voisins de cette villa.

— Je me demandais si au fond, cette villa n’était pas un lupanar.

— Lupanar, c’est quoi ?

— Un bordel, une maison de prostitution.

— Et pourquoi pas ? Tout est à envisager.

— Mais ce qui reste obscur, c’est que la fille n’a pas été violée. Juste une mise en scène.

— Ouais. Étonnant ! Pour une fois, je ne peux pas dire que les hommes trempent leur plume dans tous les encriers.

— Bon, ça va bien avec tes citations.

— Merci pour le compliment. Ce n’est pas une citation, ça vient de moi.

— Ah ! Je croyais.

— Va falloir faire travailler notre imagination pour trouver l’assassin. Aucun indice pour l’instant. On n’a qu’une seule chose.

— laquelle ?

— Les cordes.

L’un des policiers rangea dans un sachet les éléments recueillis et sa prise de notes.

— Bon, je vous laisse. Je vais faire un tour près de cette villa. Je veux voir si on peut y entrer par d’autres portes que celle qu’a empruntée Hugo. Et puis, je veux savoir si des voisins ont vu quelque chose. Sait-on jamais !

Kerval sortit. Il monta dans sa voiture et regagna la villa. Il ne savait pas vraiment ce qu’il allait y chercher. Mais il voulait être au plus près de la scène de crime. Il y a toujours des détails qui vous échappent à chaud. En y retournant, Kerval pensait trouver des choses qu’il n’avait pas décelées à première vue.

Arrivé à la villa, Kerval s’aperçut que les curieux ne manquaient pas. Il dut se frayer un passage pour accéder à la villa. Rien n’avait été déplacé depuis sa première visite. Des bandes « scène de crime » avaient été mis tout autour du lit pour laisser le champ intact.

Il regarda le bar où Hugo s’était servi. Son verre avait été retiré par la police. Tout s’était passé dans cette pièce. Kerval faisait les cent pas dans toutes les directions, furetant du regard chaque recoin. Il finit par s’arracher à la vision de cette fille qui le hantait. Comment avait-elle pu se laisser piéger ?

Kerval repartit en direction de sa voiture. Il fit le tour du quartier. Il regarda avec une attention particulière les villas alentour. Il fit quelques croquis, pour voir si l’une des villas se trouvait dans l’axe. Peut-être qu’une vidéo-surveillance aurait pu filmer l’entrée de la villa le jour du crime.

 Au bureau, tous attendaient l’arrivée de Kerval.

— Bonjour. J’ai mis deux policiers pour monter la garde devant la villa pour surveiller la scène de crime. J’ai demandé une voiture pour emmener le cadavre à l’institut médico-légal pour des analyses.

— Une fois qu’on aura identifié cette fille, il faudra vérifier ses relations.

— Un policier est encore en train de perquisitionner à la villa. Examiner avec minutie la scène de crime est primordiale.

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